
Une ouverture sur les défis actuels
La matinée a débuté par une introduction de Ha Hoang, Doyenne de la Recherche à l’ESSEC, qui a rappelé l’importance des études de genre dans un monde en mutation. L’agenda du genre n’est plus uniquement une question de parité ou d’inclusion, mais un enjeu transversal impactant les dynamiques économiques, sociales et culturelles.
Laurent Bibard, professeur au département Management de l’ESSEC, a ouvert les présentations avec une intervention sur la phénoménologie de la sexualité. Il a mis en lumière l’influence de la situation géopolitique sur les questions de genre, rappelant que celles-ci sont de plus en plus politisées, comme en témoignent les débats autour des minorités sexuelles ou des déclarations de dirigeants influents. Cette instrumentalisation politique du genre s’inscrit dans un contexte plus large de régression des libertés, où les idéaux de démocratie, d’égalité et de respect sont fragilisés. Laurent Bibard a insisté sur la nécessité de ne pas oublier l’histoire et les combats menés contre le sexisme et le patriarcat. Dans un monde où les démocraties sont mises à l’épreuve, il a ainsi appelé à la vigilance et à l’action pour préserver ces acquis fondamentaux.
Des chiffres et des faits : comprendre l’impact du genre dans l’économie
Angela Sutan, professeure associée au département Public & Private Policy de l’ESSEC, a présenté des expériences menées sur la sélection des femmes dans les entreprises. Ses travaux s’inscrivent dans un contexte où les femmes continuent de représenter moins de 30% des postes de direction en France selon l’Insee. Un des résultats marquants de ses recherches est que la composition des comités de sélection influence directement la part des femmes recrutées. Lorsque les recruteuses sont des femmes, les choix sont mixtes à 37 %, contre seulement 13 % lorsque ce sont des équipes exclusivement masculines qui décident.
Un autre aspect étudié concernait la manière dont les femmes sont éliminées des processus de sélection. En utilisant des avatars pour simuler des candidatures et observer la formation des conseils d’administration, Angela Sutan a mis en évidence une tendance inquiétante : les femmes sont les premières à être évincées des processus de sélection. Ces résultats soulignent l’importance de comprendre les dynamiques de sélection afin d’identifier les leviers d’action pour une meilleure représentation des femmes dans les postes à responsabilités.
Isabelle Solal, professeure assistante au département de management de l'ESSEC, a analysé l’influence du genre des dirigeants sur la rémunération des employés. En s’appuyant sur des données provenant du Portugal, elle a observé que les salaires les plus élevés, en particulier ceux des femmes, tendent à être moins importants dans les entreprises dirigées par des femmes. Ses résultats soulèvent des questions essentielles sur les perceptions et comportements liés à la rémunération et au leadership, ouvrant la voie à de nouvelles recherches. Si la présence de femmes à des postes de direction est souvent associée à des préférences plus favorables aux employés, cette corrélation ne se traduit pas nécessairement par une réduction des inégalités salariales entre hommes et femmes. Ces résultats invitent à repenser les effets attendus de la féminisation des postes de direction sur la réduction des inégalités salariales et à explorer plus en profondeur les relations employeurs-employés et les perceptions qui sous-tendent ces pratiques. L’étude met en évidence le rôle central des dirigeants dans la fixation des salaires, ainsi que les préférences et choix des salariés qui influent sur les pratiques salariales.
