Tristan Maurel : « Devenir d’ici 5 ans leader des alternatives végétales aux filets de viande »

21.4.2022

C’est l’un des projets vainqueurs de l’ESSEC Founders Day 2021, la compétition de startups de l’école. Avec Umiami, Tristan Maurel souhaite proposer une alternative à la viande, en produisant des filets végétaux à la texture similaire. Cette innovation pourrait bien révolutionner notre manière de consommer de la viande, dès l’été 2022. La startup vient ainsi de boucler une levée de fonds de 26,5 millions d’euros. Diplômé du double diplôme ESSEC-CentraleSupélec, il revient sur l’histoire d’Umiami et les nombreux challenges qui l’attendent.

Quel est ton parcours en quelques mots ?

J’ai fait mes études à l'ESSEC et à CentraleSupélec. A l’ESSEC, je me suis spécialisé en finance, et à Centrale en biotechnologie. J'ai une expérience en banque d'investissement, où j'ai participé à des opérations de fusions-acquisitions, notamment pour des biotechs. Sur un plan plus personnel, je suis vegan depuis trois ans pour des raisons éthiques, notamment suite à la lecture du livre de Matthieu Ricard, « Plaidoyer pour les animaux », qui m’a mis face à la réalité de l’élevage. Je ne pouvais plus manger de produits d'origine animale. C'est l’une des raisons qui m’a poussé à créer Umiami, avec mon associé Martin, en mai 2019.

Justement, quelle est la genèse d’Umiami ?

A la base, c’est un projet étudiant à Centrale. Nous trouvons dans les plantes tous les nutriments présents dans la viande. Nous nous sommes donc dit qu’on pourrait utiliser ces plantes pour imiter la texture de filets de viande et de poisson. C’est quelque chose que personne n’avait encore mis au point.

Nous avons travaillé pendant plusieurs mois à Centrale, c’était même ma thèse de troisième année de master. Nous obtenions des résultats en créant des fibres au sein de gels protéiques. C'était encore loin du produit que nous avons mis au point actuellement, mais c’était quand même une base qui nous semblait suffisamment prometteuse pour créer une entreprise. L’aventure n’aurait sûrement pas continué si nous n’avions rien réussi à créer de concret. Notre approche était radicalement différente de ce que faisaient les autres acteurs du secteur, nos résultats apportant une vraie différence sur le plan gustatif. C'est vraiment sur cette base que toute la projection sur l'avenir s'est faite. Ce n’était plus une idée, mais du concret.

Quels sont vos prochaines étapes pour Umiami ?

Le premier jalon, c’est la construction d'un pilote semi-industriel. Ensuite, il y aura la commercialisation avec la mise sur le marché. Il faudra observer comment les consommateurs interagissent avec nos produits et s’ils plaisent. Est-ce que les clients rachètent les produits ? Il faut un produit de long terme, que les gens fassent rentrer dans leurs habitudes de consommation. C’est très important. Nous visons ainsi une disponibilité au deuxième trimestre 2022. Ce sera un deuxième jalon important.

Et puis ensuite, il y aura le passage d'une échelle semi-industrielle à une échelle massive où, vraiment, nous produirons des milliers de tonnes tous les ans dans chaque usine. Ce sera encore une étape supplémentaire. L'internationalisation et la vente de nos produits hors d’Europe seront clées. Lorsque nous aurons le premier modèle d'usine en France,nous allons chercher à multiplier ce modèle dans le monde entier. Ce sera un vrai défi car il faudra s’adapter aux spécificités de chaque continent.

Nous avons un objectif majeur : devenir d’ici 5 ans leader des alternatives végétales aux filets de viande ou de poisson. Si c'est le cas, c'est que nous aurons fait du bon travail. Dans un secteur où personne n’a encore véritablement pris le leadership aujourd’hui, ce sera alors très difficile de nous concurrencer. Lorsque nous aurons installé toutes nos capacités de production, réduit les coûts, augmenté la qualité, il sera difficile de venir nous déloger.

Avez-vous atteint aujourd’hui un niveau de qualité du produit conforme à vos attentes ?

Concernant le goût et le prix, je pense que nous nous rapprochons vraiment de la viande. Notre produit est très, très, très proche même ! On a un goût un peu plus gourmand que le blanc de poulet classique, qui est très apprécié lors des dégustations. Sur le plan de la texture, le produit est plus juteux, c'est très apprécié aussi. Nous nous posons d’ailleurs la question de le laisser tel quel, ou de le rendre un peu moins juteux pour être plus proche de la viande. Il reste encore à faire ce genre de petits ajustements. Nous allons faire des tests sur le marché, voir quels produits fonctionnent le mieux.

Du point de vue écologique, le bénéfice est énorme. On ne tue pas d'animaux, on ne les élève pas dans des conditions inhumaines. Nous diminuons l’impact sur l’environnement : de l'ordre de dix fois moins d'émissions de gaz à effet de serre, dix fois moins de surfaces cultivées et deux fois moins d'énergie.

Cela pourrait révolutionner durablement la façon dont on consomme la viande. Est-ce que cela n’est pas un peu effrayant une innovation pareille ?

Ce qui m’effraie personnellement, c’est la façon dont la viande est produite aujourd’hui. C’est désastreux. On est en train de piller nos sols. On détruit l'environnement à coup de pesticides, à coup de transport de marchandises de l'autre bout du monde pour nourrir les animaux d'élevage. Bref, on est en train de piller la planète avec l'agriculture actuelle. Ça, c’est effrayant ! Il faut absolument changer de modèle. Et c’est la direction d’Umiami : permettre aux consommateurs de consommer comme avant, des produits qui sont aussi bons en termes de goût, de nutriments, qui sont bien meilleurs pour l'environnement, les animaux, et notre santé.

A propos de ton parcours académique, que retiens-tu de ton passage sur les bancs de l’ESSEC ?

J'étais dans une super promo du double diplôme ESSEC-CentraleSupélec, on a vraiment passé une belle année ensemble. Je retiens notamment les associations étudiantes, qui représentent une superbe opportunité pour faire des choses différentes de tout ce qu’on a fait auparavant. Et puis j’ai pu faire un semestre à Singapour, ce qui m’a permis de voyager, de voir autre chose.

Est-ce que ton passage à l’ESSEC t’a permis de faire avancer ton projet entrepreneurial ?

J’ai utilisé le réseau de l'ESSEC pour des partenariats avec des fournisseurs de matières premières. J'ai aussi recruté un ESSEC pour le poste de CFO dans la boîte. Et l’ESSEC Founders Day nous a donné pas mal de visibilité, c’était bien ! Cela m'a permis de rencontrer des investisseurs. On croise les doigts, peut-être que certains d'entre eux vont investir !

Plus d’informations sur Umiami : https://www.umiami.com/

Plus d’informations sur le double diplôme ESSEC-CentraleSupélec : https://www.essec.edu/fr/programme/grande-ecole/grande-ecole-concours/partenaires/

Plus d’informations sur l’entrepreneuriat à l’ESSEC : https://www.essec.edu/fr/pages/propos-de-lessec/entrepreneuriat-innovation/notre-philosophie/

Retrouvez la vidéo de l’ESSEC Founders Day : https://youtu.be/hjhTiMgkvTE

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