Pouvez-vous nous présenter rapidement votre parcours ?
J’ai exercé pendant plus de vingt ans au développement des performances commerciales, dans une logique orientée sur la progression des talents, au sein d’entreprises multisectorielles et de toutes tailles allant de grand groupe, ETI, PME à la start-up. Mes fonctions se sont étendues à toutes les dimensions du business, en demeurant centrées sur une relation qualitative avec les clients de leur conquête à leur fidélisation. Cette dynamique a impliqué des responsabilités de dirigeantes variées qui impliquaient l’exécution de développement d’organisation, des transformations structurelles d’activité et des évolutions constantes des stratégies commerciales.
De cette expérience riche, s’est affirmée l’ambition de fonder Qoninov, une start-up qui adresse le marché de l’E-santé où tout est à faire, mais où le recul et l’anticipation sont plus que jamais nécessaires dans le contexte actuel que nous traversons.
Qoninov a conçu sa première solution de service santé, qui relie par un comptoir privatisé les pharmacies à leurs patients à distance et en instantané, pour délivrer de services innovants d’accompagnement, de prévention et de suivi de l’évolution de l’état de santé durant la consommation de médicaments.
D’où vous est venue l’idée de créer Qoninov ? Quels problèmes souhaitez-vous résoudre ?
C’est une inspiration qui vient de loin.
J’ai accompagné dès mon plus jeune âge une personne proche atteinte de maladies chroniques. En 2018, nous étions aux balbutiements de l’e-santé et j’ai pris l’initiative d’orienter sur cette voie les activités d’une start-up dans laquelle j’exerçais. Une entreprise nous a confié la création d’une des premières plateformes de télémédecine incluant le tiers payant. J’ai vu rapidement émerger des logiques contradictoires. À cet instant, j’ai décidé de créer mon entreprise pour définir une voie qui tienne compte en priorité du patient, de son traitement et de sa relation avec les pharmaciens d’officine.
Malgré un maillage officinal d’exception, une officine ferme ses portes tous les deux jours alors que la démographie n’a cessé de progresser au cours des dernières années. Le rôle du pharmacien s’est diversifié brusquement, de nouvelles activités se sont superposées aux précédentes. En parallèle, le mode de vie des usagers a évolué. Les personnes sont mobiles, souvent éloignées dans la journée de leur pharmacie de quartier. Certains manquent de temps du fait des horaires et des jours de travail qui se sont étendus jusqu’au week-end ; d’autres à contrario souhaitent qu’on leur alloue du temps pour s’extraire d’une indifférenciation de plus en plus marquée. La France figure parmi les pays qui consomment le plus de médicaments au monde et notre santé n’en est pas plus améliorée. Cela ne suffit donc pas ou ne suffit plus. La technologie a, par ailleurs, transformé notre rapport aux autres. Et depuis la pandémie, ce même rapport est totalement bouleversé. La création de vecteurs d’interactions complémentaires y compris à distance me semble aujourd’hui indispensable et plus urgemment avec les pharmaciens d’officine, qui sont les seuls professionnels de santé de proximité dont les portes restent ouvertes pour accueillir des patients.
Quelle est votre perspective sur l’évolution des services de santé ?
Les services de santé représenteront d’ici 3 ans un de puissants leviers de compétitivité. La crise sanitaire, la technologie, et les futurs nouveaux concurrents vont considérablement accélérer des changements de comportements chez les usagers. Pour les officines, deux voies sont possibles : soit l’extension de la structure officinale (avec ou sans regroupement de pharmacies) ou la diversification des revenus par les services de santé. Dans cette perspective, Qoninov s’est inscrit dans une démarche continue de création de nouveaux services de santé en faveur des patients et de leurs officines. Notre objectif vise l’introduction de nos services sur près d’un tiers du réseau officinal en cinq ans.
Quelles sont les prochaines étapes pour votre société ?
Des recrutements de talents sont prévus afin de contribuer au développement de notre activité. Nous souhaitons faire vivre de multiples ambitions dans notre entreprise en termes de créativité, d’accès à de nouveaux savoir-faire et d’esprit de conquête de marché. Le lancement commercial de notre solution est planifié pour le second trimestre. Nous comptons accélérer notre introduction sur le marché en procédant à une levée de fonds.
Après avoir construit une belle carrière avec notamment des responsabilités de directrice commerciale, vous décidez en 2019 de vous former avec le programme Management Général. Pourquoi ce choix ?
Diriger une entreprise implique de savoir définir une vision. Quelle vision pouvez-vous régénérer en demeurant dans votre zone confort à faire ce que vous maîtrisez depuis plusieurs années ? Le monde change dans sa globalité. J’ai décidé de rejoindre le programme de Management Général de l’ESSEC pour développer un regard au-delà des périmètres explorés et des frontières afin de saisir les mouvements à l’échelle du monde et discerner les principaux enjeux pour nos territoires. Qu’il s’agisse de diriger ou d’entreprendre, cela doit tenir compte d’un alignement stratégique éclairé en identifiant nos opportunités de changement et les impacts positifs et responsables à inclure dans la définition de notre vision. Le programme s’inscrit dans une approche holistique qui consiste à faire émerger des recommandations stratégiques en s’appuyant sur une vision managériale avancée. Le choix de Management Général a donc été marqué par ma volonté de me réinventer pour être parmi les protagonistes de l’avenir.
Qu’est-ce que cette formation destinée aux dirigeants vous a apporté ?
Cette formation est un déplacement du regard avec une portée de vue plus lointaine. J’ai pu y rencontrer des personnalités d’une qualité intellectuelle exceptionnelle et dont l’humanité demeure une source d’inspiration.
Cette formation m’a permis de dépasser l’écran de projection pour être pleinement moi-même. C’est en quelque sorte une renaissance.
D’un point de vue professionnel, j’ai pris conscience de la puissance entrepreneuriale croissante sur d’autres continents. Notre potentiel de développement dépend étroitement de notre capacité à élargir nos coopérations à l’échelle internationale. Dans le champ des opportunités, il n’existe pas de bonnes trajectoires sans risque. L’apport principal consiste donc à les identifier, les anticiper dans la mesure du possible et de passer à l’action. Surtout de passer à l’action. L’énergie est dans le mouvement.
Comment le programme vous a aidé dans la création de votre projet ?
J’ai intégré le programme de Management Général pour créer mon entreprise.
Il m’a fallu tout d’abord surmonter le challenge de la bourse aux projets qui a procédé à la sélection de 8 projets sur les 22 présentés au sein d’une promotion de 33 participants.
J’ai ainsi fédéré trois dirigeants Sébastien Cugnet, Gavin Marshall et Eric Fallet qui m’ont prêté main forte pour donner corps à un projet complexe, faisant l’objet de fortes barrières réglementaires à l’entrée. Ils n’ont pas eu froid aux yeux, malgré la méconnaissance du secteur, ils ont tous les trois fait preuve d’un engagement sans relâche pour franchir les nombreuses étapes. Nous avons partagé de grands moments de fraternité et de solidarité. C’est une expérience inoubliable.
Le projet a bénéficié de l’accompagnement durant une année de Carole Donada, Professeur expert de stratégie et de management au sein de l’ESSEC. C’est une des premières qui ait exprimé pleinement son soutien. Elle est d’une remarquable capacité de structuration. Elle nous a appuyés dans notre démarche d’innovation, que l’on a cessée d’approfondir à la suite de l’enseignement dispensé par Xavier Pavie, directeur du programme Management de l’innovation responsable.
À cela, s’est ajouté un coaching collectif et un coaching individualisé mené par M. Xavier Grenet, Consultant RH et ancienennement DRH chargé des cadres et dirigeants du groupe Saint-Gobain. Par son esprit subtil et sa profonde humanité, il a contribué à élever davantage notre hauteur de vue et nous a encouragé à rechercher constamment le meilleur en nous-même.
Mais ce projet n’aurait jamais vu le jour sans l’exigence et l’inconditionnel soutien du directeur académique du programme, le Professeur Philippe-Pierre Dornier. La force de son expérience, la maîtrise du secteur pharmaceutique et de ces enjeux nous ont challengé en permanence à des réalités auxquelles on se confronte habituellement au stade de l’exécution. J’ai eu grâce à cela un coup d’avance, une excellente préparation pour définir une vision de plus forte ampleur. Sa rigueur et la puissance de son débat contradictoire m’ont induite à de profondes remises en question. Cela a donné de la robustesse aux réflexions menées, puis à ma démarche.
Ce programme a été un tremplin vers de nouvelles opportunités. J’ai depuis intégré un programme de mentoring sélectif de haut niveau, dédié aux diplômés expérimentés de l’ESSEC, qui permet de booster entre autres les femmes entrepreneures.
Quels conseils donneriez-vous aux dirigeants fondateurs d’entreprise ?
La clé de voûte d’un bon démarrage repose sur votre capacité à bien vous entourer et de parvenir à dépasser vos propres attentes pour développer des ambitions plus collectives. La formation continue est, à l’évidence, un excellent ressort pour challenger vos réflexions. Par ailleurs, il est important de financièrement anticiper la trésorerie de chacune des étapes déterminantes de votre projet pour conserver la dynamique du « time to market » et de ses imprévus. Enfin, une bonne manière de nourrir la vision dans la durée consiste à garder une partie de ses idées pour l’avenir.
Pour aller plus loin :
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